Le Dr Jean-Pierre Jourdan a
étudié ces expériences qui regroupent aussi bien des
expériences contemporaines que des techniques décrites
depuis des millénaires par d'autres cultures et qui
peuvent être classées en deux catégories :
- Dans la première catégorie, les
expériences spontanées dont font partie les NDEs et où l'on
retrouve aussi les OBEs (out-of-body experience) au cours
desquelles une personne se perçoit comme étant à l'extérieur
et à distance de son corps physique. On trouve aussi dans
cette première catégorie les expériences mystiques et
religieuses.
- La deuxième catégorie concerne
les expériences provoquées ou recherchées, soit par
différentes techniques de relaxation (utilisant par exemple
la maîtrise de la respiration ou l'isolement sensoriel)
ainsi que par le neurobiofeedback qui peuvent aider à vivre
une OBE, soit par des techniques physiques et/ou
spirituelles comme le yoga ou la méditation
transcendantale, qui peuvent conduire à ce qu'on appelle
un "réveil de kundalini". La kundalini est dans
la tradition hindoue une "énergie ou force
évolutive" symbolisée par un serpent lové à la base
de la colonne vertébrale, dont l'éveil puis l'ascension
va ouvrir les différents centres énergétiques appelés
chakras, puis, atteignant le dernier au sommet du crâne,
éveillera la conscience à une réalité supérieure. Cet
éveil qui peut se faire sur des mois ou des années est
accompagné de symptômes physiques et psychiques ainsi que
de conséquences étonnamment similaires à ceux rapportés
par les témoins de NDEs.
En dehors de la tradition hindoue,
de nombreuses autres traditions semblent posséder ainsi
leur propre technique, élaborée de manière empirique,
permettant d'accéder à un état de conscience
particulier, et qui, quelle que soit la méthode utilisée,
présente toujours de grandes similitudes avec les NDEs.
Ainsi, il existe beaucoup d'états modifiés de
conscience, spontanés ou recherchés, possédant de
nombreux points communs avec les NDEs, tant au niveau du
déroulement de l'expérience qu'au niveau de ses
répercussions ou de ses effets à long terme sur les
témoins, et tous semblent conduire à une transformation
allant dans le sens d'une évolution personnelle. La
sensation de faire partie d'un Tout, une conscience
élargie, ainsi que l'apparition de facultés psychiques
extraordinaires sont couramment décrites à la suite de ces
expériences.
En essayant d'établir un
parallèle entre ces techniques et les expériences de
Penfield ou celles vécues sous kétamine, le Dr Jourdan
aboutit à une hypothèse complexe et intéressante. L'hippocampe
apparaît alors comme la cible commune à tous ces chemins d'accès
à un autre état de conscience qui permettraient d'isoler
et de libérer la conscience du flux d'information dont
les organes des sens la saturent constamment, lui permettant
d'accéder à un autre niveau de perception. Cette
précision quant aux circonstances où surviennent de telles
expériences est importante car, vu sous cet angle, les
expériences de mort imminente pourraient être en fait
interprétées comme des expériences de "vie
imminente", c'est-à-dire des circonstances
particulières au cours desquelles se produirait plus
facilement la libération d'un formidable potentiel de l'esprit
humain, insoupçonné mais à la portée de tout un chacun
à n'importe quel moment de sa vie. D'autre part, l'étude
de ces états de conscience particuliers associés à des
techniques très bien codifiées pourrait être plus facile
que l'étude des états associés aux NDEs pour lesquels
nous n'avons pour l'instant que des témoignages à
posteriori.
Comme le suggère le Dr Jourdan,
étudier ces techniques ancestrales avec nos connaissances
actuelles pourrait peut-être permettre d'en comprendre
les mécanismes neuro- et psychophysiologiques sous-jacents.
( Dr Jourdan, 1992) .
http://www.outre-vie.com/vieapresvie/insolite.htm
http://www.outre-vie.com/index.htm
*Mes remerciements à Xourim et
"Outre-vie" de m'avoir autorisé à publier cet
extrait ci-dessus de leur site
<OUTRE-VIE>
****************
Expériences de Mort Imminente et
Expériences Transcendantes.
Corrélations et hypothèses
neurophysiologiques.
Dr.J-P Jourdan
Article publié dans l'ouvrage
collectif : Le processus de guérison : par delà la
souffrance ou la mort, sous la direction de Luc Bessette, Ed.
MNH, Canada 1993.
Paru aux Etats-Unis (en anglais)
dans le Journal of Near Death Studies, vol 12, n°3, Spring
1994.
Leur survenue à l'approche de la
mort laisse penser au grand public que l'on va, en étudiant
les NDE, avoir la réponse à la question de la survie. Mais
ceci a pour résultat de masquer un fait essentiel: Si les
NDE se produisent dans des circonstances particulières,
impliquant le plus souvent une atteinte physiologique (NDE
"classique"), et au minimum un stress
psychologique ("Fear Death Experience") , des
expériences tout à fait semblables surviennent , en dehors
de tout risque vital, soit spontanément , soit parce
qu'elles sont recherchées et provoquées par diverses
techniques que l'on peut qualifier de psychophysiologiques,
dans un contexte le plus souvent mystique.
Ces expériences peuvent être
comparées au niveau de leur déroulement (certaines, hormis
les circonstances , sont strictement identiques à des NDE),
mais aussi au niveau de leurs effets à long terme . Aussi
dérangeantes que soient ces répercussions, elles ont une
existence, ne serait-ce que parce que les témoins les
rapportent. Aucune étude sérieuse ne peut se permettre de
les éluder.
La question est donc simple : Ou
l'on décide arbitrairement que tous ceux (y compris donc
les plus grandes figures spirituelles) qui ont vécu de
telles expériences ont été victimes d'hallucinations à
la limite du pathologique, et le problème est résolu, ou,
avec un minimum de curiosité, on se dit que tous ces
récits sont suffisamment proches et consistants pour
mériter une étude plus approfondie..
Dans la mesure où la
phénoménologie des NDE est maintenant bien connue, nous
allons voir seulement quelques extraits de témoignages
français, concernant essentiellement les "effets à
long terme". La conception de la vie, le sens des
valeurs, le comportement des témoins sont profondément
modifiés après une telle expérience. Quelques citations
seront plus parlantes qu'une longue explication.
D'abord, quelques "impressions
de voyage":
Un témoin parle de " la part
de divin qui est en nous "; elle a l'impression que
"dans cette réalité on ne vit qu'à moitié, alors
que la réalité se situe après la mort.." , qu'elle
définit comme "une naissance à un autre plan, un
réveil" . Une autre déclare :"en chaque être
humain il existe l'étincelle divine" , et pour elle la
réalité terrestre est illusion, car nous n'avons pas ici
bas les réelles données pour comprendre le sens de la
vie.. ".. J'ai eu l'impression que mon corps faisait
partie de la terre, de l'eau, du ciel,des étoiles, des
cailloux, j'étais moi-même sans doute, et puis surtout
j'étais le tout, c'est difficile à expliquer,..ce faisant,
j'étais...je ne peux pas dire ni que ce fût de la joie, ni
de l'allégresse, c'était une forme de bien être que je ne
pouvais même pas mettre en parallèle avec la béatitude
que, du reste, je ne connais même pas".."Je n'ai
pas vu de personnage au bout du tunnel, c'était
l'infini" , et à propos de l'être humain: "il
est tout petit, mais il contient tout, à nous de traverser
nos couches et d'aller à l'essentiel, mais peut-on
l'exprimer avec des mots?" .. Un témoin parle de
"la plongée dans l'amour infini, cette paix, cette
sensation d'amour infini, d'atteindre l'absolu vers lequel
vous tendiez, et la lumière merveilleuse et chaude dans
laquelle (elle s'est) baignée.
Il ne faut pas oublier que ces
expériences sont, de l'avis unanime, très difficile à
faire comprendre à qui n'a jamais rien connu de similaire,
et, même dans ce dernier cas, les concepts manquent et les
mots sont bien pâles et insuffisants. Un témoin, par
exemple, avoue:
"je n'ai parlé à personne de
mon expérience pendant longtemps, pour différentes
raisons; d'abord je ne voulais pas mettre de mots dessus,
parce que j'avais l'impression d'en enlever, enlever de là
cette splendeur, en fait, parce que c'était... c'était
impossible à mettre en mots ,ce n'était pas la peine que
j'en parle, parce que de toute façon ç'aurait été
compris de travers, c'est très très douloureux de porter
ça et de ne pas en parler".
Essayez donc de traduire avec des
mots une symphonie, pourtant bien terrestre, et de décrire
les émotions que vous avez éprouvées en l'écoutant, que
va-t-il en rester?.
Durant une NDE, il semble qu'un
accès soit ouvert vers un état de conscience différent,
dans lequel une réalité plus vaste , transcendant le
temps, l'espace et la matière, englobe la réalité
ordinaire. Et apparemment, cet accès ne se referme pas
totalement après l'expérience.. Il semble, comme le
formule si bien K.Ring, qu'une semence ait été plantée,
libre de germer ou non avec le temps. Quelques citations
donnent une idée de ce qu'elle pourrait être:
" ma sensibilité s'est
développée, rêves prémonitoires parfois, télépathie
très souvent. Je décide d'appeler ma mère ou ma fille, ou
je pense qu'elles vont m'appeler,et dans les cinq minutes
j'ai un coup de fil; après mon expérience j'ai fait
plusieurs sorties hors du corps.."..."...
sensibilité plus développée, possibilités
télépathiques, et grande facilité pour la décorporation,
possibilité de soigner et d'aider les autres"."
La sensibilité est plus grande, j'apprends plus vite, je me
concentre mieux, j'ai plus de mémoire et de dons psychiques
mais surtout je cherche à m'incarner et à ne plus me
dédoubler; c'est dans et à travers le corps que
l'expérience de la vie se déroule et nulle part
ailleurs.."
La NDE semble, en donnant à la
conscience la possibilité d'avoir des liens moins étroits
avec le corps, être à l'origine d'OBE (Out of Body
Experience, en français expérience hors du corps)
fréquentes, comme encore chez ce témoin qui, cloué au lit
après un grave accident,vivait une OBE presque toutes les
nuits. Pendant ces expériences, il avait la sensation d'une
identification totale à ce sur quoi se portait son
attention (si dans une forêt il s'intéressait à un arbre,
il devenait cet arbre,,ses feuilles, ses racines, son
histoire.Chez un autre se produisaient des "décorporations
de nuit (en sommeil conscient), ce qui me permettait d'aller
aider des mourants dans le monde à sortir de leur corps
sans peur" .
Ces capacités sont parfois un
fardeau, car il semble que les phénomènes de précognition
concernent le plus souvent des évènements à forte charge
émotionnelle. Le futur n'est pas toujours souriant, et
même si pour eux la mort ne représente que l'abandon d'un
corps usagé, certains témoins se passeraient volontiers de
voir à l'avance le décès de leurs proches. Par exemple
:"je me suis rapidement rendu compte, dans les mois qui
ont suivi cette expérience, que je rencontrais des gens et
que je savais combien de temps il leur restait à vivre sur
cette terre et, croyez moi, ce n'est pas confortable du
tout" .
Un autre aspect est nettement plus
souriant, plus fréquent aussi: de nombreux témoins
s'aperçoivent qu'ils ont la possibilité d'aider et de
soigner leurs semblables( l'altruisme et la compassion sont
des leitmotive dans les témoignages) :"je développe
de plus en plus le fait que je suis un canal de guérison,
que l'énergie divine de guérison passe à travers le canal
que je suis" .
Les techniques employées sont
diverses( imposition des mains, impression d'agir sur le
"corps subtil", techniques chamaniques et
psychothérapies "sauvages"-mais efficaces-,
accompagnement des mourants, etc..)
Nombreux sont aussi les témoins
faisant état de synchronicités à la suite de leur
expérience (Jung définit ainsi ce concept:"La
synchronicité signifie d'abord la simultanéité d'un
certain état psychique avec un ou plusieurs évènements
extérieurs qui apparaissent comme des éléments
parallèles signifiants par rapport à l'état subjectif du
moment et -éventuellement- vice versa").
Quiconque a un peu étudié les
traditions mystiques retrouvera là bon nombre de
caractéristiques que l'on rencontre dans les relations
d'expériences transcendantes et dans leurs suites, qu'elles
soient survenues en Orient ou en Occident, de nos jours
comme il y a mille ans .
On trouve des relations
d'expériences tout à fait similaires dans toutes les
traditions ( tao, yoga, zen, soufisme, gnosticisme,
chamanisme, hesychasme,! Kung, etc) et même hors de toutes
traditions mystiques, (sondage dans les universités : 30 à
40 % des étudiants ont eu au moins une OBE spontanée, dont
certaines ont un contenu pour le moins similaire aux NDE) .
Mais si toutes les traditions font
référence à cet éveil à une conscience plus élevée,
une l'a particulièrement codifié, et a aussi codifié les
techniques permettant de l'atteindre . Il existe dans la
tradition hindoue une "énergie",une force
évolutrice, symbolisée par un serpent lové à la base de
la colonne vertébrale, dont l'éveil puis l'ascension
ouvrent d'abord des centres appelés Chakras (ils sont 6 ou7
selon les sources, répartis le long de l'axe du corps);
puis, ayant atteint le dernier,situé au sommet du crâne,
ils éveillent la conscience à une réalité supérieure
(Jung fait ici aussi figure de précurseur, puisqu'il avait
organisé, en 1932, un séminaire sur la Kundalini!).
Voici ce qu'en dit Lilian Silburn
(29) :" La Kundalini,cet axe dressé au centre même de
la personne et de l'univers, est à l'origine de la
puissance de l'homme dont elle draine et épanouit la
totalité des énergies. Mais plutôt que sue les pouvoirs
extraordinaires acquis par son intermédiaire, les partisans
des systèmes(....) mettent l'accent sur l'apaisement et
l'harmonie vivante qu'elle confère. L'énergie mystérieuse
qu'éveille le yoga de la Kundalini se révèle cependant
d'une violence inouïe et ne peut être manipulée sans
faire encourir un réel danger."
Pour Tara Michael (19) :"Quand
Kundalini dort dans le muladhara ( le premier et le plus bas
situé des chakras), l'homme est éveillé au monde. Mais
quand elle s'éveille pour s'unir à Siva, l'homme s'endort
au monde et ne fait plus qu'un avec la conscience infinie au
delà des formes".
Il est facile d'effectuer un
rapprochement entre l'apaisement dont parle Lilian Silburn
et les récits de témoins de NDE, et "ne faire plus
qu'un avec la conscience infinie" est une impression
pour le moins fréquemment rapportée (même si elle est
difficilement descriptible). Les changements à long terme
que l'on retrouve chez les personnes ayant vécu une NDE
font précisément partie, sinon des buts, du moins des
étapes que l'on rencontre dans le yoga, quand aux Siddhis(pouvoirs)
que l'éveil de Kundalini est censé conférer (et à
l'encontre desquels les mises en garde ne manquent pas!) ,
il s'agit très exactement de ceux que présentent de façon
spontanée de nombreux témoins(accès à des modes
d'information transcendant le temps (précognition),
l'espace (télépathie, clairvoyance, OBE), la matière
(dons de guérison, psychokinèse), etc.. Quand au danger,
nous verrons que certaines expériences sont
particulièrement perturbantes, physiquement et
psychologiquement.
Le rapprochement entre les NDE et
le concept d'éveil de Kundalini a déjà été fait par
Kenneth Ring, qui le développe dans un ouvrage passionnant
(27) , et les phénomènes physiques, psychologiques,et
sensoriels en relation avec ce phénomène ont été
étudiés par Lee Sanella (28) , I. Bentov (1) et H.
Motoyama (21) . Bentov propose en outre un modèle
explicatif.
L'une des caractéristiques de ce
phénomène est qu'il est accompagné d'une cohorte de
symptômes divers, sensitifs, sensoriels, psychologiques,
moteurs. Il se trouve que si la tradition yogique l'a
codifié et caractérisé, on s'aperçoit que cet ensemble
d'effets "latéraux" est présent dans un bon
nombre de relations d'expériences liées à la
transcendance, un peu partout dans le monde et à toutes les
époques. Il semble donc y avoir un phénomène universel,
produisant un ensemble d'expériences que l' homme a de tous
temps connu et recherché dans le but de transcender sa
condition ordinaire.
Pour essayer de comprendre ce qui
se produit, voici deux exemples parmi les plus connus:
Gopi Krishna, un brahmane hindou
ayant reçu un enseignement occidental, n'avait rien d'un
mystique. La pratique régulière de la méditation était
le seul lien qu'il avait gardé avec la tradition hindoue.
Un matin, alors qu'il méditait sur un lotus lumineux au
sommet se son crâne, il perçut une sensation étrange mais
plaisante à la base de la colonne vertébrale, sensation
qui disparaissait et revenait avec les fluctuations de
l'attention qu'il y portait. Reprenant sa concentration avec
la détermination de ne pas s'en laisser distraire, il
perçut à nouveau la même sensation s'étendant vers le
haut ." Brusquement, raconte-t-il,, avec un rugissement
semblable à celui d'une cataracte, je sentis un flot de
lumière liquide envahissant mon cerveau par la colonne
vertébrale...L'illumination se fit de plus en plus
éclatante, le rugissement plus fort, j'eus une sensation
d'oscillation, d'ébranlement, et tout à coup je me sentis
glisser hors de mon corps, entièrement entouré d'un halo
de lumière, simultanément conscient et pleinement présent
en chaque point.... baigné dans la lumière et dans un
état d'exaltation impossible à décrire" ... Ce
n'était que le début d'une expérience qui allait durer
des années, des moments d'exaltation alternant avec des
périodes de doute et de dépression qu'il raconte et
développe dans plusieurs ouvrages.. (13)
Hiroshi Motoyama, un scientifique
japonais, décrit son expérience survenue à la suite de
pratiques de yoga et de pranayama (techniques respiratoires)
pendant plusieurs mois :" ..continuant ma pratique, je
commençai à remarquer des sensations nouvelles. Des
fourmillements au niveau du coccyx, des picotements au
niveau du front et du sommet du crâne, une sensation de
chaleur dans le bas ventre. Je percevais un son , comme un
bourdonnement d'abeilles, au niveau du coccyx. Dans la vie
de tous les jours mon sens olfactif devint si sensible que
je ne pouvais supporter la moindre mauvaise
odeur"..."
"Cela continua durant deux ou
trois mois. Un jour, alors que je meditais devant l'autel
comme d'habitude, j'eus une sensation de chaleur
particulièrement forte dans la région du bas-ventre...
soudain, une énergie incroyable se précipita à travers la
colonne vertébrale jusqu'au sommet de ma tête, et, bien
que celà n'ait duré qu'une seconde ou deux, mon corps
lévita à quelques centimètres du sol. J'étais terrifié,
mon corps entier était brûlant, et des maux de tête
atroces m'empéchèrent de faire quoique ce soit de la
journée".
Quelques mois plus tard, il
commença à avoir des rêves prémonitoires, de fréquentes
expériences extrasensorielles (télépathie) se
produisirent. Ses souhaits semblèrent commencer à se
réaliser spontanément. A ces talents vinrent s'ajouter des
phénomènes de clairvoyance s'accentuant avec l'éveil
progressif des différents chakras . Quelque temps après,
raconte t'il, "je vis une sorte de chaleur-énergie
montant du coccyx jusqu'au coeur le long de la colonne
vertébrale (...) La kundalini continuant son chemin, du
coeur jusqu'à la tête (...), je quittai mon corps par le
sommet du crâne, et je gagnai une dimension supérieure
(...). Je possède depuis un don de guérison" . Dans
le même temps, il subit de profonds changements sur le plan
psychologique, perdant en particulier tout attachement aux
biens matériels.. Avec l'éveil d'un autre chakra (Visuddha
chakra, perçu au niveau de la gorge), il devint capable,
dit il, de voir le passé, le présent et le futur
"dans la même dimension".
Ces deux expériences ont bien des
points communs, et on retrouve des conceptions identiques
dans d'autres traditions, ce qui semble impliquer
l'existence d'un phénomène plus ou moins universel,
interprété à sa façon par chaque tradition:
On trouve dans le Livre des Morts
égyptien un "symbole du fluide vital , du serpent de
feu qui se trouve dans l'épine dorsale. C'est ce fluide qui
est le souffle de la vie que le prêtre transmet en imposant
ses mains sur la nuque du défunt que l'on veut réchauffer
et recouvrir de la chaleur d' Isis". Le serpent est
dans cette tradition le symbole de l'éternité et de la
réincarnation, et est censé permettre l'acquisition de
pouvoirs magiques.
Pour les taoïstes chinois,
"l'énergie ne fait pas que circuler dans les
méridiens: elle se concentre dans certaines zones reliées
par des forces: les trois "champs de cinabre"...
Le champ de cinabre supérieur prend naissance au niveau du
point curieux Inn Trang (entre les deux sourcils).. Le champ
de cinabre moyen , ou "Palais écarlate ", se
situe sur la poitrine. Le coeur en forme le centre. Il sert
de moteur à la circulation des énergies. Le champ de
cinabre inférieur, troisième centre énergétique, (..) se
projette à trois travers de doigts au dessus du nombril. La
maitrise des respirations permet d'espérer atteindre la
transmutation de l'énergie mentale en un élixir d'or
s'écoulant goutte à goutte par le canal médian et se
mêlant à l'énergie ancestrale et au Ki. En une gerbe
flamboyante, la substance née de la fusion du Ki, de
l'énergie ancestrale et de l'énergie mentale, s'élevant
par le canal central jusqu'au creuset supérieur, brise
l'orbite universelle du Tao en une floraison d'or, d'argent,
de soleil et de lune".
Un anthropologue, Richard Katz, a
étudié une peuplade vivant dans le désert du Kalahari,
les !Kung (! et / correspondent à des phonèmes
particuliers à leur langue). Cette tribu pratique un rituel
semblant avoir de nombreux points communs avec ce que nous
venons de voir: celui ci a pour but d'éveiller, d'enflammer
le "N/um" afin d'atteindre un état nommé !Kia,
dans lequel des possibilités extraordinaires apparaissent,
en particulier pouvoirs de guérison, vision à distance,
marche sur le feu, etc..
Le N/um est dit résider dans le
creux de l'estomac; une fois réveillé, il monte depuis la
base de la colonne vertébrale jusqu'au crâne, permettant
alors d'atteindre l'état !Kia : "vous sentez quelque
chose d'effilé dans votre colonne vertébrale, qui monte
progressivement... puis la base de votre colonne se met à
fourmiller, fourmiller, fourmiller,...alors dans votre tête
vos pensées ne sont plus rien"... Comment ce
phénomène est il provoqué? "Vous dansez, dansez,
dansez, puis N/um vous soulève dans votre ventre, et vous
soulève dans votre dos, et vous commencez à frissonner...
N/um vous fait trembler, il est chaud. Vos yeux sont
ouverts, mais vous ne regardez pas autour de vous. Votre
regard reste tranquille et vous regardez droit devant. Mais
quand vous êtes dans l'état !Kia, vous regardez autour de
vous, parce que vous voyez tout, parce que vous voyez les
problèmes de tout le monde... Une respiration rapide et
superficielle, voilà ce qui fait redresser N/um... puis N/um
se répand dans tout votre corps, du bout des pieds
jusqu'aux cheveux."
Lee Sannella, psychiatre, est
reconnu comme l'un des spécialistes de ces phénomènes. Il
a réuni dans un ouvrage (28) de nombreux témoignages
similaires à ce que nous venons de voir, mais qui
concernent, eux, des expériences contemporaines. Des
personnes ayant vécu une NDE décrivent les mêmes
symptômes, suivis des mêmes conséquences (Barbara HARRIS
a détaillé son expériencedans un livre (10) et son cas
est étudié en détail par k.RING (27)
I.BENTOV et L.SANNELLA ont
regroupé les symptômes survenant lors de la progression de
ces expériences sous le nom de Physio-Kundalini. On peut
les classer sous trois rubriques:
* -Symptômes sensoriels:
fourmillements, vibrations ou sensation
d'"énergie" localisés puis montant le long de la
colonne vertébrale, redescendant ensuite dans la poitrine
et l'abdomen, sensations orgasmiques(purement sexuelles ou
se répendant parfois dans tout le corps), douleurs débutant
et cessant brutalement,sensations de froid ou de chaleur
dans diverses parties du corps, perception de sons divers,
de lumière intérieure illuminant parfois le corps.
* -Symptômes moteurs: mouvements
spontanés des mains et du corps,contractions
involontaires(anus, abdomen, gorge) , altérations du rythme
respiratoire, blocage ou paralysie soudaine de certaines
parties du corps.
* -Symptômes psychologiques: joie ou
extase soudaine, accès d'anxiété ou de dépression,,
accélération de la pensée, expansion de la conscience
au-delà des limites corporelles.
Voici, afin d'essayer de comprendre
ce qui peut se passer, un premier indice: la plupart des
techniques utilisées semblent avoir pour but de
déconnecter la conscience des stimuli extérieurs et des
émotions, soit en la concentrant sur un point : méditation
sur un objet, un concept, un son, une posture.., soit
récitation d'un mantra, d'une prière ; soit par la
contemplation (plusieurs expériences spontanées sont
survenues en occident chez des laïcs, lors de la
contemplation d'un paysage, de la mer, etc.)ou la relaxation
profonde.
Mais il existe un fonds commun,
retrouvé à peu près partout, c'est l'utilisation de la
respiration avec d'abord une notion essentielle , que l'on
retrouve de façon explicite: l'équation
conscience <=> souffle
En voici quelques exemples:
Pour commencer, voici un texte
taoiste, "Le secret de la fleur d'or" (14) ; pour
le comprendre, on doit savoir deux choses:
* -en Chinois, le même idéogramme
possède simultanément les significations de "coeur"
et de "conscience".
* -cet idéogramme est lui même
incorporé dans celui qui signifie "respiration".
"..la respiration vient de la
conscience/coeur. Ce qui sort de cette conscience/coeur est
la respiration .....puisque la conscience et la respiration
dépendent l'une de l'autre, on doit unir la révolution de
la lumière à un rythme donné à la respiration,.."
.. "les grands saints, qui ont reconnu comment la
conscience/coeur et l'énergie respiratoire s'influencent
mutuellement, ont mis au point une méthode ..."
Dans le Hathayoga Pradîpika :
"lorsque le souffle se meut, l'esprit aussi ; quand le
souffle arrête son mouvement, l'esprit devient
immobile".
Dans le yoga tibétain (7):
"..en vertu de ces pratiques, cette chose appelée
l'esprit - si difficile à contrôler, à cause de son
incapacité normale de fonctionner en dehors du processus de
respiration qui est la cause des élans constants d'une
pensée à l'autre - se discipline et se libère de cette
dépendance avec la respiration".., avec pour
commentaire : " la durée d'une pensée égale la
durée d'une respiration...le but de ces exercices est d'entrainer
l'esprit à fonctionner indépendamment de la respiration et
ainsi n'être plus influencé par le processus de pensée.
Les concepts s'élèvent dans l'esprit à cause des stimuli.
Il faut neutraliser les stimuli , et le processus de pensée
disparait, l'esprit atteint alors son état naturel". .
Dans le Vijnanabhairavatantra (29)
: ".. lorsqu'on fait échec au flot tout entier des
activités sensorielles au moyen de l'énergie du souffle
qui s'élève peu à peu ...."
On retrouve (5) chez les moines du
mont Athos une technique d'oraison, l'Hésychasme, qui
consistait en une maitrise du souffle et en la répétition
des mots "Kyrie Eleison".
Chez les !Kung : "une
respiration superficielle et rapide, voila ce qui fait
dresser N/UM" ..
De nombreuses techniques
chamaniques reposent sur le souffle (6) , on retrouve la
même observation chez les médiums célèbres, qui semblent
avoir trouvé là un mécanisme facilitant leurs exploits :
Eileen GARRET, par exemple (9) :
.. ."c'est par la respiration,
et la respiration seulement, qu'il m'est possible de
m'élever au dessus de ma condition de tous les jours et de
devenir clairvoyante. Quand j'entre en contact avec
quelqu'un qui a besoin de mon aide, je renifle son
atmosphère, réellement, avec une compréhension animale.
Je pense qu'une bonne partie de ma clairvoyance pourrait
être dûe à une faculté primitive oubliée. Je fais
exactement ce que fait un chien quand il sent l'odeur d'un
lapin..."
Dans tous les cas, il s'agit bien
de rythmer le souffle, soit en le ralentissant, parfois
jusqu'à l'apnée, soit en l'accélérant. Les états
atteints par ces techniques vont de la transe plus ou moins
complète jusqu'à la perte totale du contact avec la
réalité, induisant alors, d'après la tradition un état
qui peut indduire une expérience transcendante.
Afin d'en dégager les
caractéristiques essentielles, je propose tout d'abord de
regrouper toutes ces expériences, similaires par leurs
caractéristiques essentielles, en évitant de les classer
en fonction des circonstances de survenue.
On pourrait appeler ENO
(Expérience Non Ordinaire), les expériences comprenant :
* -persistance de la conscience et
de la mémorisation
* -sentiment de réalité
* combinés avec au moins l'un des
points suivants : -sentiment de béatitude
* -impression de sortie du corps
* -transcendance du temps et /ou de l'espace
* -perceptions par des canaux
inhabituels, différents des sens ordinaires
* -perceptions sous formes
différentes :
* vision panoramique
* fusion/identification avec
l'objet ou le phénomène observé
* perception et compréhension non
verbale
* -accès vérifié à une
information impossible à obtenir par les moyens habituels
et dans les circonstances de l'expérience
* -perception ou participation à
un
évènement transcendant de nature spirituelle ou
mystique.
* -effets "secondaires" :
restructurants, thérapeutiques ou évolutifs
* acquisition de capacités dites
"psi", ou thérapeutiques
Restons en là pour l'instant et
voyons quelques bases pour pouvoir réfléchir là- dessus.
Organisation des perceptions:
(26,16)
Il faut d'abord considérer
séparément les informations olfactives, qui sont traitées
différemment des autres. En effet, elles sont adressées
directement aux aires corticales olfactives qui, appartenant
anatomiquement au système limbique (apparu dans la
phylogénèse avant le néocortex), ont été au cours de
l'évolution refoulées au centre du cerveau.
L'aire olfactive primaire est le
cortex pré-piriforme, le gyrus parahippocampique ou cortex
entorhinal étant considéré comme l'aire olfactive
secondaire.
Les informations visuelles,
auditives et tactiles en provenance des organes sensoriels
passent, elles, d'abord par un relais (centres genouillés
thalamiques) qui est responsable d'une réaction
d'orientation et d'une focalisation de l'attention sur le
champ correspondant à "ce qui est nouveau" dans
l'environnement (permet le passage automatique de
l'attention diffuse à une attention focalisée.
Ces informations passent ensuite
aux cortex spécifiques de chaque organe sensoriel, où
elles sont analysées et où se fait la relation entre les
deux hémisphères cérébraux. Ces informations une fois
traitées, sont adressées aux aires associatives , où
elles sont intégrées et mises en relation entre elles.
Arrivées à ce stade, les
perceptions sont modulées sur le plan affectif et
émotionnel par des projections au niveau du cortex limbique.
Nous en sommes pour l'instant à
une série de représentations globales mais instantanées
du monde extérieur . Les paquets perceptifs
"instantanés" doivent être liés entre eux dans
le temps, pour être interprétés dans un contexte temporel
(passage d'une perception spatiale à une perception
spatio-temporelle). Les influx en provenance des aires
associatives sont donc ensuite adressés, via le cortex
entorhinal, à l'hippocampe où l' on trouve une
"mémoire de travail" qui garde stockées les
perceptions précédentes et les lie avec les dernières
arrivées. Les informations y sont reliées temporellement
(on passe de l'instant au présent) puis renvoyées vers le
néocortex. Il y a donc à ce niveau un circuit pourvu de
boucles de rétroaction qui retraite en permanence
l'ensemble des perceptions.
Pour A. REMOND, l'hippocampe est le
"lieu de la perception consciente au présent".
L'information ainsi traitée est
ensuite renvoyée vers les structures du néocortex (cortex
temporo- pariétal et cortex fronto-temporal) où
s'effectuent intégration sémantique et cognitive.
P.L.T., Rythme thêta hippocampique
et comportements essentiels pour la survie : (32,33)
Cherchant à comprendre les
phénomènes impliqués dans l'apprentissage et le
développement cérébral, Donald Hebb proposait en 1949 que
l'activité neuronale puisse être responsable de
modifications des connexions synaptiques (si un neurone en
stimule un autre fréquemment ou de façon constante, des
modifications structurales ou métaboliques des deux
cellules ou de l'une d'entre elles pourraient renforcer
leurs connexions).
A cette époque, cette hypothèse
était invérifiable, mais en 1966, Terje Lomo, à Oslo,
découvrit la Potentialisation à Long Terme, une
facilitation de la transmission synaptique par laquelle,
s'ils sont soumis à des combinaisons particulières
d'influx nerveux, certains neurones subissent des
modifications durables et parfois définitives.
Ce phénomène se produit, chez les
mammifères, essentiellement au niveau de l'hippocampe.
Cette zone est impliquée dans les phénomènes de
mémorisation et d'apprentissage, permis précisément par
l'existence de la P.L.T. Une activité electrique
particulière (aux alentours de 4-7 Hz) appelée rythme
thêta est au moins l'un des facteurs de ce phénomène dans
la mesure où il est susceptible d'activer les récepteurs
NMDA, qui sont les sites initiateurs de la PLT. Ceci a été
mis en évidence (23) par le fait que des trains
d'impulsions à haute fréquence synchrones et en phase avec
les pics positifs de l'onde thêta, appliquées dans
certaines régions de l'hippocampe favorisent la PLT, alors
que s'ils sont appliqués en opposition de phase ils
inhibent ce phénomène.
Jonathan Winson a publié en 1977
un 1er article où il rend compte du fait que la
transmission neuronale au niveau de l'hippocampe est
dépendante du comportement ( il comparait le sommeil à
ondes lentes, le sommeil à mouvements oculaires rapides
(sommeil paradoxal) et l'état d'éveil alerte immobile). Le
rythme thêta hippocampique est lié chez les mammifères
aux relations avec l'environnement qui sont essentielles
pour leur survie, contrairement aux comportements
génétiquement programmés, comme l'accouplement ou
l'alimentation, durant lesquels on ne le retrouve pas . Il
apparait chez le chat dans les comportements de prédation,
chez le rat dans les comportements d'exploration, chez le
lapin s'il appréhende la présence d'un prédateur.. Sa
fréquence est synchrone des manifestations physiques de de
ce comportement, c'est à dire mouvements respiratoires
(reniflement), mouvement des vibrisses (moustaches) , etc.
Son rôle semble être de
synchroniser le traitement des informations sensorielles
lors de ces comportements essentiels : par exemple chez le
rat explorant son environnement, les messages olfactifs et
ceux provenant des vibrisses convergent en même temps que
les autres messages sensoriels , via le cortex entorhinal ,
vers l'hippocampe où ils sont traités par paquets,
découpés toutes les 200 ms par le rythme thêta.
Pour J. Winson (32) "On peut
supposer que pour des animaux comme le rat, qui font grand
usage de l'olfaction, il soit important que toutes les
informations sensorielles, tactiles en provenance des
vibrisse, (moustaches), visuelles et auditives soient
coordonnées avec l'inhalation cyclique des odeurs. En ce
sens, le cortex entorhinal, l'hippocampe et le reste du
cortex limbique pourraient traiter toutes les informations
sensorielles de conserve avec les perceptions olfactives -un
évènement est lié à son odeur-" .
A mon avis, bien que je sois peu
qualifié pour en juger, il pourrait aussi s'agir de
l'équivalent, pour l'olfaction, de la réaction
d'orientation thalamique , qui, nous l'avons vu, ne concerne
que les perceptions auditives, visuelles et tactiles.
Les messages olfactifs concernant
des informations vitales pour les mammifères inférieurs,
le rythme thêta serait alors en quelque sorte un signal de
priorité , les informations arrivant de façon synchrone
avec les pics positifs étant considérées comme vitales,
et donc traitées et mémorisées en conséquence..
Le rythme thêta peut être aussi
influencé par une stimulation labyrinthique (COSTIN et
al.): ".. chez l'animal (un lapin) éveillé et au
repos, une accélération angulaire provoque l'apparition
d'un rythme thêta hippocampique hypersynchrone et de haute
amplitude.." .
Thêta et rêves:
Le rythme thêta n'apparait pas
uniquement durant les comportements que nous venons de voir.
Il survient aussi pendant la phase paradoxale du sommeil,
malgré l'absence de mouvements et de recherche
d'informations. Pour J. WINSON, le circuit
néocortex-hippocampe, étant à nouveau soumis au rythme
thêta, pourrait remanier durablement la mémoire (une
expérience astucieuse décrite dans l'article de Pour la
Science (33) semble le démontrer chez le rat). Malgré le
fait que ce rythme soit difficile à mettre en évidence
chez les primates, et en particulier chez l'homme, WINSON
suppose que ce même phénomène existe chez nous et est, au
moins en partie, responsable des rêves.
Les Récepteurs
NMDA:
Les recepteurs NMDA, que l'on
trouve dans la membrane des dendrites des cellules
granulaires et des cellules du CA1 de l'hippocampe et de
certains neurones du néocortex, sont ainsi nommés car ils
fixent un acide aminé artificiel, le N Methyl D Aspartate,
ce qui permet de les caractériser. C'est à leur niveau que
se situe la potentialisation à long terme Leur ligand
physiologique est le glutamate, qui est un acide aminé
neurotransmetteur rapide. Cette caractéristique, qui permet
une transmission et un traitement rapides des influx
sensoriels, est malheureusement contrebalancée par ce qu'on
appelle l'excitotoxicité: dans le cas où le glutamate est
libéré en trop grande quantité (ce qui arrive en cas
d'anoxie) il devient toxique et entraine la mort du neurone
où il est libéré.
******
Après cet interlude un peu aride,
nous allons voir que certaines expériences,
phénoménologiquement proches des ENO, peuvent être
provoqués par certains produits pharmaceutiques ou par des
perturbations physiologiques:
La kétamine est un anesthésique
dissociatif. Il provoque une diminution d'activité au
niveau du néocortex et des structures sous corticales, et
une augmentation de celle ci au niveau du système limbique
et de la substance réticulée : le patient est déconnecté
sur le plan sensoriel (donc en particulier des stimuli
douloureux) mais non réellement endormi. L'effet dépend
bien entendu du mode d'administration (IM ou IV) et de la
dose. La kétamine agit en particulier au niveau du
néocortex, du thalamus et de l'hippocampe en se fixant sur
les recepteurs NMDA. Selon la dose administrée, la
conscience et la mémorisation persistent, alors que les
perceptions sensorielles sont progressivement
déconnectées.
Ses effets semblent en faire un bon
modèle expérimental pour l'étude des ENO : dans une
expérimentation (3) portant sur deux groupes, l'un recevant
40 à 6O mg de kétamine IV, l'autre un mélange 50/50 de
protoxyde d'azote et d'oxygène, dans le but d'induire une
analgésie somatique sans sommeil, on trouve:
-Dans le groupe 1, comportant 11
patients ayant reçu de la kétamine :
* -10 ont eu la sensation de
flotter dans l'espace
* -9 ont senti leur esprit ou leur
conscience quitter leur corps
* -4 ont vu des formes colorées ou
blanches tout en ayant les yeux fermés
* -3 ont pu regarder en bas et voir
leu
r corps sur le chariot et purent noter le moment exact
où leur conscience a regagné leur corps
* -1 se sentit devenir une boite
parmi d'autres empilées..
* -2 ont eu l'expérience de leur
conscience se déplaçant très rapidement dans une
direction à travers un espace vide, avec absence totale de
concepts de temps et de lumière ;
-Pour les 10 ayant reçu N2O + O2 :
* -1O ont eu une distorsion de la
per
ception corporelle
* -5 la sensation de flotter en
montant
* -2 ont souffert de claustrophobie
intense
* -2 ont eu des vertiges
* -4 ont eu des pertubations de
l'audition.
L'auteur (M. COLLIER) compare les
descriptions faites par les patients avec ce qui est
expérimenté lors d'expériences d'isolation sensorielle
(LILLY, HEBB)
La kétamine a été utilisée en
psychiatrie (13) comme agent pharmacologique susceptible d'entrainer
une abréaction (définie comme une réaction
d'extériorisation par laquelle un sujet se libère d'un
refoulement affectif). Les doses utilisées étaient infra
anesthésiques, pour la plupart de 0.4 à 0.6 mg/Kg. Les
patients traités (100) présentaient diverses pathologies
(névroses d'angoisse, névrose obsessionnelle compulsive,
syndromes dépressifs, etc..).
L'effet recherché était
considéré comme présent si les patients présentaient:
1/excitation; 2/décharges émotionnelles; 3/ verbalisation
d'un conflit; 4/phénomènes d'émergence. En cas d'absence
de réponse spontanée, l'effet abréactif était induit par
stimulation verbale de la part du psychiatre présent.
L'effet semble avoir été un retour à la conscience de
souvenirs, en particulier ceux d'évènements ayant mené à
l'apparition de troubles psychiatriques.. Six mois après
l'expérience, 91 patients étaient jugés guéris.
Voici quelques exemples de ce
qu'ont rapporté les patients:
" j'étais dans un monde
différent, et par des retours en arrière j'ai vu de façon
très vivante les évènements qui m'ont amené à être
malade"
.. "je parlais avec la Sainte
Famille"
.. "je me déplaçais partout
et je voyais tout"<
br>.. "je marchais dans un
endroit infini et je voyais ma vie se dérouler devant mes
yeux" .. "je volais, en poursuivant ma propre
vie"..
Dans les années 50, L.T. MEDUNA
(17) a tenté le traitement de divers troubles
neuropsychiques par l'administration d'un mélange
comportant 70% O2 et 30% CO2 à des sujets volontaires. Il a
ainsi provoqué l'apparition d'expériences dont certains
points (sensation de sortie du corps, vision d'une lumière
brillante, ineffabilité de l'expérience, etc.) ressemblent
à ce qui est vécu lors d'une NDE, mais accompagnées
d'importants troubles neurologiques et d'hallucinations
désagréables.
Il semble aussi que des
perturbations fonctionnelles expérimentales des lobes
temporaux soient à l'origine de phénomènes intéressants,
dont voici un exemple:
Neurochirurgien exerçant à
Montréal, WILDER PENFIELD a décrit dans les années 5O les
résultats d'expérimentations consistant à stimuler
électriquement différentes zones des lobes temporaux lors
d'intervention pour épilepsie temporale (24,25) . Les
patients, n'étant pas endormis pouvaient ainsi décrire
leurs perceptions. Les zones amenant les réponses les plus
intéressantes se trouvaient, à droite et à gauche, au
niveau des faces latérales et supérieures des lobes
temporaux. Les phénomènes décrits étaient des réponses
motrices, des illusions sensorielles ou somatiques, des
sensations de vertige, l'impression de quitter son corps,
mais aussi des phénomènes beaucoup plus complexes, comme
des rappels de pans entiers de souvenirs, sensations de
déjà vu, audition de morceaux de musique, reviviscence de
certains moments de la vie, etc.
Notons un exemple cité dans
l'article de PENFIELD, concernant l'impression de sortie du
corps : la stimulation portait sur un point situé à 2 cm
à l'intérieur de la scissure de Sylvius, donc de la face
supérieure du lobe temporal. Cette stimulation provoqua une
perception de doux-amer sur la langue du patient . La
stimulation fut coupée, et sur l'électrocorticogramme
apparut un rythme lent à 4hz généralisé (post
décharge). C'est à ce moment que le patient s'exclama :
"mon dieu, je sors de mon corps". Quand l'électrocortigramme
revint à la normale, cette sensation disparut. PENFIED
émettait déjà l'hypothèse que les stimulations
superficielles du lobe temporal pouvaient en fait agir sur
une zone plus profonde qui lui était directement liée, et
responsable en particulier du stockage des souvenirs.
L'hippocampe était pour lui un bon candidat.
On a trouvé depuis des connections
monosynaptiques puissantes entre le cortex temporal et les
structures limbiques , en particulier avec l'hippocampe.
Une hypothèse intéressante:
Un auteur Néo-Zélandais, K.L.R
JANSEN propose (11) une hypothèse basée sur le fait que la
Kétamine agit en bloquant les récepteurs NMDA, en
particulier au niveau de l'hippocampe, faisant ainsi
obstacle au phénomène de Potentialisation à Long Terme,
ce qui équivaudrait en fait à fermer le canal d'accès des
informations sensorielles.
L'auteur suppose que celles ci sont
alors remplacées par des souvenirs qui viennent occuper le
devant de la scène. La découverte de ligands endogènes
(3) pour ces mêmes récepteurs apporte de l'eau au moulin
de cette hypothèse: ces ligands, appelés a et b
endopsychosines, seraient susceptibles d'être libérés en
cas d'anoxie, dans le but de bloquer l'accès du glutamate
aux récepteurs NMDA et d'empêcher ainsi la mort du neurone
cible par excitotoxicité. Le résultat serait à ce moment
là similaire à ce que l'on retrouve sous kétamine,
expliquant ainsi, au moins, les phénomènes de mémoire
panoramique et la revue de vie que l'on retrouve au début
de bien des NDE.
Avant d'aller plus loin, une mise
au point s'impose. Nous touchons, dans cette recherche, au
domaine spirituel, qui est bien au delà des mots, au delà
aussi de l'expérience commune. Il n'est pas question ici de
comparer, ni surtout de chercher à expliquer un domaine où
l'expérience ne peut être qu'intime, non partageable et
bien au delà des possibilités humaines d'analyse et de
compréhension.
La seule chose que nous puissions
faire pour l'instant est d'essayer d'"attraper "
un indice solide, et de "tirer dessus", pour voir
ce qui vient avec...
Cet indice me semble résider dans
les divers facteurs pouvant être à l'origine du
déclenchement de ces expériences, et si l'on peut en
dégager un substat neuro- et psychophysiologique commun, il
deviendra peut-être possible de mettre en route une
recherche objective, et non plus uniquement
phénoménologique et spéculative.
Interprétation:
Nous avons vu que pour J. WINSON,
le sommeil paradoxal serait, chez l'homme comme chez
l'animal, lié à un processus de retraitement de
l'information reçue en état de veille et à un remaniement
de la mémoire, par l'application d'un rythme thêta à
l'hippocampe durant le sommeil.
Ce rythme, dont il a été montré
chez l'animal qu'il est corrélé en fréquence et en phase
avec les mouvements respiratoires dans certaines
circonstances, semble capable de moduler le traitement de
l'information et de la mémoire, aussi bien durant la veille
qu'au cours du sommeil. Des perturbations induites par des
moyens pharmacologiques ou autres (kétamine, hypercapnie,
stimulations électriques) ayant pour cible les mêmes
formations (en particulier l'hippocampe) semblent
susceptibles de provoquer des effets identiques.
Il me semble que ce fait pourrait
tout d'abord apporter une explication élégante à l'effet
cathartique que l'on retrouve aussi bien avec la kétamine
que dans les états modifiés de conscience provoqués par
l'utilisation de diverses techniques respiratoires ou
autres, ainsi qu'à la suite d'expériences de mort
imminente. En effet, en admettant que l'un des facteurs du
remaniement mémoriel, durant le sommeil, soit l'apparition
d'un rythme thêta appliqué au circuit
néocortex-hippocampe, un rythme thêta
"artificiel", provoqué par un rythme respiratoire
particulier ou des mouvements impliquant une stimulation
labyrinthique appliqué durant l'état de veille à ce même
circuit pourrait être susceptible, dans certaines
conditions, de reproduire ce fonctionnement. On peut alors
comprendre l'afflux de souvenirs qui surgit dans certaines
expériences.
Si une autre caractéristique du
sommeil paradoxal, la déconnection sensorielle et motrice,
est aussi reproduite, on retrouve toutes les conditions qui
semblent être à la base de bon nombre d'ENO..
L'hippocampe est une structure
archaïque du cerveau qui jouait autrefois un rôle capital
dans l'odorat . Ce rôle est maintenant dévolu à l'aire
entorhinale, qui reçoit et traite aussi les influx
intéroceptifs (16) ), mais il est possible que les circuits
qui modulent son fonctionnement puissent persister chez
l'homme.
Nous avons vu que les influx
provenant des aires sensorielles primaires et associatives
parviennent à l'hippocampe par le cortex entorhinal, qui,
conservant une liaison directe avec l'olfaction pourrait
voir son fonctionnement modulé par un rythme respiratoire
particulier. Si l'on considère comme plausible l'hypothèse
que le rythme thêta soit, en fait, au niveau olfactif,
l'équivalent de la réaction d'orientation thalamique pour
les autres sens, il devient tout à fait compréhensible
qu'un rythme respiratoire volontairement modifié puisse
"leurrer" certains circuits, et donner la
priorité aux informations olfactives et intéroceptives,
inhibant par là même la transmission des autres
informations sensorielles (voir la relation de l'expérience
de Hiroshi Motoyama, qui se plaint d'une sensibilité
olfactive exagérée..). Mais nous ne sommes pas une espèce
particulièrement "olfactive", et si de plus il
n'y a pas d'odeur particulière à percevoir, ceci pourrait
se traduire en fait, dans la plupart des cas, par une
focalisation de la conscience sur..rien! , et donc par une
déconnection sensorielle.
Le fait que la plupart des
techniques employées dans les traditions que nous avons
vues impliquent une maitrise du souffle ou une stimulation
labyrinthique (rotation chez les derviches tourneurs, danse
dans beaucoup de techniques chamaniques) qui semble elle
aussi susceptible de déclencher des bouffées de rythme
thêta hippocampique, laissent penser qu'il en est bien
ainsi. Il est en fait probable que toute altération
volontaire du rythme respiratoire puisse avoir un effet plus
ou moins prononcé sur le traitement de l'information au
niveau cérébral.
On peut déduire de tout ceci une
première hypothèse : les NDE font partie d'un vaste
ensemble d'expériences que j'ai appelé ENO, qui ont toutes
pour point de départ une déconnection sensorielle. Le fait
qu'on retrouve un détachement émotionnel (en particulier
dans les NDE) semble impliquer une déconnection, aussi, de
certaines parties du système limbique et corrobore cette
hypothèse. Hormis le cas de l'isolation sensorielle où
c'est l'environnement qui ne procure aucun stimulus, il
semble que tous les mécanismes que nous avons vu puissent
concerner le traitement de l'information au niveau de
l'hippocampe et des stuctures qui lui sont reliées. Cette
déconnection pourrait être, durant les NDE, due à une
libération de substances neuroprotectrices bloquant les
récepteurs NMDA (ainsi que le suppose Jansen, qui y voit
une explication à la "revue de vie" survenant au
début des NDE), alors que le déclenchement volontaire
d'expériences similaires par des exercices respiratoires
pourrait être du à un blocage progressif des influx au
niveau de l'hippocampe, permis par la persistance de voies
archaïques de modulation des perceptions à ce niveau.
Cette perturbation peut être
identique dans les "Fear Death Experiences" où
l'on peut faire un parallèle avec la SIA (Stress Induced
Antinociception) consistant en une réponse diminuée aux
stimuli douloureux en cas de stress. Celle-ci passe par une
perturbation des voies sérotoninergiques (2,31) . Dans la
mesure où de nombreuses voies afférentes de l'hippocampe
sont sérotoninergiques (Melvin MORSE propose à ce sujet
une hypothèse (20) concernant les NDE), il est possible que
l'analgésie dans la S.I.A. soit produite par une modulation
au niveau de cette zone, qui puisse parfois être suffisante
pour provoquer une déconnection complète, induisant donc
l'équivalent d'une NDE.
Dans les expériences portant sur
l'hypercapnie , l'augmentation du taux de CO2 pourrait être
interprété comme annonciatrice d'une anoxie, provoquant de
même la libération de substances neuroprotectrices, le CO2
étant responsable de phénomènes annexes provoquant la
distorsion et le caractère désagréable des perceptions,
peut être par le biais d'une hyperexcitabilité au niveau
du lobe temporal.
Pour les expériences mettant en
jeu la kétamine : action à peu près similaire à celle
des endopsychosines, induisant au minimum un afflux de
souvenirs, et pour une dose suffisante une déconnection
plus complète provoquant OBE, etc...
Pour les expériences de PENFIELD :
La sensation déclenchée par la stimulation du lobe
temporal étant gustative, il est possible qu'une zone du
cortex entorhinal (lobe piriforme) ait été stimulée
indirectement. L'OBE décrite est survenue après la
cessation de la stimulation, alors que se produisait un
phénomène de synchronisation aux alentours de 4hz, qui
peut avoir perturbé l'hippocampe en mimant un rythme
thêta, à moins que le rythme enregistré ait été lui
même une post décharge hippocampique ayant diffusé au
lobe temporal ).
En ce qui concerne les expériences
vécues durant des exercices de méditation pure, le lien
entre le rythme thêta hippocampique et le rythme thêta
cortical, hormis une identité de fréquence, n'est pas
clair. Cependant, les enregistrement EEG (31) de yogis
expérimentés ont montré durant la méditation une
apparition de rythmes lents, d'abord alpha puis thêta,
devenant prépondérants. Une étude de PALMER (22) , en
1979, a montré que sur 20 sujets, les 3 qui avaient eu les
OBE les plus vivantes avaient plus de 30% d'ondes thêta
dans leur EEG, impliquant pour le moins une certaine
déconnection de l'environnement.
*******
Il est donc possible de trouver un
lien purement neurophysiologique pouvant rendre compte du
déclenchement des ENO, lien concernant essentiellement une
formation clé, l'hippocampe. Peut on aller plus loin?
L'hypothèse que je propose, selon laquelle l'hippocampe
pourrait voir son fonctionnement modifié par des facteurs
extérieurs semble permettre, sinon d'expliquer, du moins de
proposer une interprétation à certains des phénomènes
collatéraux décrits dans la tradition et confirmés par
les témoignages d'expériences contemporaines.
On retrouve dans toutes les
narrations d'expériences de ce type une cohorte de
sensations diverses, déja décrites sous le nom de
physio-kundalini. Si ces phénomènes semblent, dans ce
contexte, relever du seul mysticisme, il n'en demeure pas
moins qu'ils ont une réalité pour ceux qui les ont vécus.
La question qui se pose alors est la suivante: de quoi
sont-ils le reflet?
Pour analyser celà, voyons
quelques prémisses: L'éveil de Kundalini est dit permettre
une évolution, une transcendance de la condition humaine
habituelle. Il doit donc être corrélé à des changements
réels, sur le plan physiologique aussi bien que
psychologique
On sait que certaines techniques
comme le biofeedback (8) sont susceptibles de provoquer des
modifications durables de fonctions végétatives, donc
normalement hors du contrôle de la volonté. La plasticité
du système nerveux est suffisante pour permettre
d'envisager que la façon dont nous fonctionnons ne soit pas
figée ou soumise à des règles strictes, mais puisse être
modifiée , soit involontairement dans les mécanismes
d'adaptation, soit plus ou moins volontairement par le biais
de certaines techniques.
Si les phénomènes de
physio-kundalini, qui se produisent de façon sporadique et
semblent correspondre, dans la tradition, à la progression
d'un travail, touchent apparemment tous les systèmes
cérébraux, il semble y avoir, au cours de l'expérience
qui représente la culmination de ces phénomènes une
véritable explosion , une saturation de tous les canaux de
transmission se traduisant par des synesthésies: "avec
un rugissement (auditif).. je sentis (somesthésique) un
flot de lumière (visuel) liquide (tactile) envahissant mon
cerveau par la colonne vertébrale...L'illumination se fit
de plus en plus éclatante, le rugissement plus fort, j'eus
une sensation d'oscillation, d'ébranlement (équilibre), et
tout à coup je me sentis glisser hors de mon corps..."
On peut interpréter celà comme le résultat d'une
excitation corticale généralisée, mais ne pourrait-il pas
s'agir, plutôt, d'un phénomène particulier que chaque
sens traduirait à sa façon? Un examen superficiel de ces
perceptions peut bien entendu donner à penser qu'il s'agit
de troubles cérébraux pathologiques. Certaines personnes
présentant ces symptômes ont d'ailleurs, un peu vite,
été classés et traités comme psychotiques. G.Krishna et
L.Sannella estiment tous deux qu'environ 30% des malades
étiquetés comme psychotiques ou schizophrènes sont en
fait victimes d'un "éveil" pathologique.
G.Krishna cite en exemple les
personnages appelés Avahoots en Inde et Mastanas en Perse,
qui combinent dons extraordinaires de clairvoyance,
schizophrénie et psychose maniaco- dépressive à des
degrés divers. La place manque ici pour s'étendre sur les
rapports entre la folie et la transcendance (en faisant
simplement remarquer qu'un système, quel qu'il soit, est
d'autant plus susceptible d'évoluer qu'il est loin de son
point d'équilibre, et qu'il n'y a pas de raison que le
cerveau échappe à cette règle...), mais on peut remarquer
qu'une psychose se traduit en particulier par des troubles
de l'identité et par la perte de l'estimation de la
réalité, qu'on ne retrouve pas dans les expériences
précitées.
Si certains symptômes font penser
à l'épilepsie par leur localisation et leur déroulement,
on peut préciser qu'une crise comitiale est toujours le
signe d'une souffrance cérébrale, due à un foyer
irritatif(traumatique, tumoral ou vasculaire). Quand la
crise est généralisée, il s'agit d'un évènement
dramatique de courte durée entrainant en particulier une
perte de connaissance et une amnésie post-critique. Aucune
pathologie de ce genre n'a été retrouvée pour expliquer
ces phénomènes.
Toutes les traditions mystiques
semblent rechercher une intégration des niveaux inférieurs
du psychisme, par la maitrise des comportements, des
instincts, des émotions et des perceptions, de la pensée
.. Il est probable que cette maitrise puisse être
fonctionnelle aussi bien que psychologique, au sens où le
fonctionnement du système nerveux puisse changer lui aussi,
dans la mesure où les structures les plus profondes et les
plus archaïques (cerveau reptilien et limbique) pourraient
être "maitrisées" et donc intégrées par des
structures et un mode de fonctionnement supérieurs. Il
semble, au vu des changements à long terme (l'altruisme et
l'empathie, qui sont au premier plan, sont apparus (16) avec
le développement du cortex préfrontal) que l'on trouve
chez les NDErs et chez les personnes ayant vécu une
expérience transcendante en général, que ce soit bien le
cas.
L'hippocampe est au carrefour où
se rejoignent les cortex sensoriels et associatifs (tournés
vers l'extérieur), le système limbique qui, tourné à la
fois vers l'extérieur et l'intérieur contribue à affecter
une valeur émotionnelle aux perceptions, la mémoire, et le
néocortex préfrontal qui nous confère notre humanité.
Toute modification affectant cette zone pourrait donc avoir
de multiples conséquences.
Plusieurs faits laissent penser que
ce que nous venons de voir pourrait bien être le reflet de
modifications , précisément, de son fonctionnement:
* - L'hippocampe est
particulièrement riche en récepteurs NMDA, qui se
retrouvent aussi au niveau du thalamus et du néocortex.
* -Ces récepteurs sont maintenant
connus comme l'un des principaux facteurs de la régression
synaptique (Pour La Science,N°186, p.18), qui est au centre
de la plasticité cérébrale.(Comme son nom ne l'indique
pas, la regression synaptique n'est pas un phénomène
dégénératif. En fait, comme en sculpture, plus on veut
donner de détails, plus on enlève de matière..)
* - Ils sont aussi le site de la
PLT, qui peut être à l'origine de changements parfois
définitifs du statut neuronal.
* -La PLT peut etre influencée,
toujours par le biais des récepteurs NMDA, par des facteurs
endogènes (peptides neuroprotecteurs, rythme theta), ou
exogènes (kétamine), et probablement altérations
volontaires du rythme respiratoire.
* -Contrairement à la plupart dez
zones cérébrales qui disposent de brèves périodes de
plasticité, correspondant à leur développement,
l'hippocampe conserve cette qualité tout au long de la vie.
Nous allons maintenant nous livrer
à quelques spéculations:
Les techniques de méditation et de
visualisation dans la tradition yoguique portent sur tous
les "sens": méditation ou concentration sur un
son, sur une posture, sur un symbole, sur un concept, sur
diverses parties du corps (en particulier en visualisant les
divers chakras à leurs niveaux respectifs), etc.. Elles
sont utilisées de pair avec des techniques de maitrise du
rythme respiratoire, qui ont une importance primordiale dans
toutes les traditions.
Nous avons vu que les influx
intéroceptifs, de même que les perceptions olfactives,
parviennent directement au cortex entorhinal , et il est
possible que le signal de priorité donné par le rythme
thêta puisse, dans certaines circonstances, les concerner
aussi. S'il s'avère que certaines techniques respiratoires
soient susceptibles de modifier le traitement des
informations sensorielles au niveau de l'hippocampe, on peut
supposer que les perceptions extéroceptives puisent être
inhibées, alors que les perceptions intéroceptives, qui
passent par une autre voie, seraient, dans certains cas,
transmises en priorité.
Une perception accrue de
phénomènes internes normalement inconscients est une
condition nécessaire et suffisante pour créer une boucle
de rétroaction qui va permettre d'agir en retour sur ces
phénomènes, permettant de les faciliter ou de les inhiber.
Les phénomènes de physio-kundalini pourraient alors
résulter de la perception accrue d'informations
intéroceptives (normalement inconsciente) et, pourquoi pas,
du fonctionnement de certaines parties du système nerveux,
qui serait interprété de diverses manières par chaque
système sensoriel.
On peut supposer que les diverses
techniques de concentration ou de visualisation puissent
être à l'origine d'un véritable feedback permis et
renforcé par l'utilisation de techniques respiratoires,
créant peut être des modifications durables dans le
fonctionnement de certaines parties du systême nerveux,
probablement par l'intermédiaire de phénomènes
responsables de la plasticité neuronale, comme la PLT et le
renforcement ou la régression synaptique.
L'hippocampe ayant des connexions
centrifuges avec l'hypothalamus et les autres structures
impliquées dans les fonctions somatoviscerales,
émotionnelles et endocrines(16) , on comprend alors qu'il
puisse se produire des changements (qui d'ailleurs, d'après
certains témoignages,ne sont pas toujours favorables ni
très bien supportés..) tout à fait réels au niveau de
toutes ces fonctions .
On trouve là,par la même
occasion, une explication élégante à ce que l'on appelle
la physiologie mystique (chakras avec leurs diverses
fonctions, nadis qui sont les voies de communication et de
circulation d'un "énergie",etc), qui semble plus
une projection ou une interprétation corporelle d'un
fonctionnement que d'une quelconque réalité anatomique..
Le fait que dans certaines espèces
animales, le rythme thêta hippocampique soit lié à la
fréquence respiratoire n'est pas, bien sûr, une preuve
qu'il en soit de même chez l'homme. Cependant,
l'utilisation par la plupart des traditions mystiques de
modifications du rythme et de la fréquence respiratoire
dans le but de provoquer des états modifiés de conscience
est un fait avéré et la persistance d'un circuit
archaïque permettant la modulation des perceptions et des
états de conscience chez l'homme est une possibilité qui
ne peut être écartée.
L'hippocampe est au carrefour entre
les perceptions, la mémoire et la conscience de celles ci.
Si tous les phénomènes que nous venons de voir sont
susceptibles, d'une manière ou d'une autre et avec des
effets divers, d'influer sur son fonctionnement, ce seront
alors les rapports de la conscience avec le
"monde" qui vont être modifiés.
Ce monde, nous le percevons
d'habitude par l'intermédiaire des organes des sens, qui
sont autant des filtres que des capteurs, et l'image, bien
pâle peut être, que nous en avons est celle qu'ils nous en
donnent. En fait nous fonctionnons avec une représentation
du monde, et non dans une réalité totalement objective,
même si elle est consensuelle.
Les hypothèses que j'ai proposé
concernent certaines caractéristiques du fonctionnement
cérébral qui pourraient permettre à une ENO de se
produire, et éventuellement permettraient de comprendre une
partie de leurs effets à long terme, mais ne prétendent en
aucun cas donner une explication à l'expérience elle
même. Des perceptions différentes, l'incapacité ou la
difficulté à verbaliser l'expérience, les modifications
profondes des notions de temps et d'espace lors des ENO
laissent penser que celles ci sont perçues hors des outils
corticaux de perception et de cognition habituels.
L'existence, dans de nombreux cas,
d'un apport d'information théoriquement impossible à
obtenir écartent l'hypothèse d'hallucinations ou de
phénomènes purement neurologiques. Pour ce qui concerne
les expériences de mort imminente, on trouve des
témoignages tout à fait identiques survenant aussi bien
sans aucun trouble physiologique (Fear Death Experiences)
que chez un patient anesthésié qui fait un arret
cardiaque, donc avec une combinaison d'anoxie,
d'hypercapnie, plus une intoxication par des déchets
métaboliques et produits anesthésiques. Ce fait oblige à
se poser un certain nombre de questions, la première étant
: comment peut-on vivre et mémoriser exactement la même
expérience dans des conditions de fonctionnement cérébral
si différentes?..
L'aspect profondément spirituel
des expériences que nous étudions échappe pour l'instant
à toute recherche objective, mais il existe bel et bien.
J'espère avoir pu montrer qu'il est possible de jeter un
pont, bien fragile peut être, entre la science et la
transcendance, et que ce qui concerne cette dernière peut
être abordé de façon raisonnée, sans pour autant tomber
dans les travers du réductionnisme scientiste ou du
mysticisme aveugle qui ne sont, peut être, que des reflets
différents d'un même manque de curiosité.
*Mes remerciements au Dr Jean Pierre
Jourdan de m'avoir autorisé à publier ce texte dans mon
projet sur la N.D.E.
Texte intégral et Liens
http://perso.wanadoo.fr/iands-france.org/articles/neurophysio.html
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D'autres écrits et recherches de
Jean-Pierre Jourdan
ASSOCIATION
INTERNATIONALE POUR L'ETUDE
DES ETATS PROCHES DE LA MORT
International
Association for Near Death Studies
http://perso.wanadoo.fr/iands-france.org/
The International Association for Near-Death Studies
http://www.iands.org/iands/
Dossier Circonstances
http://noesis.ch/circonstances.html
A Resource Dedicated to Study of
Near-Death Experiences
http://www.lazarus.ws/ndeart.html